Le jour se levait à peine lorsque Six quitta sa demeure. C’était la moment pour sa ballade quotidienne à la recherche de l’inspiration. À peine était-il rentré de cette marche, il s’installa sur un banc dans son atelier pour commencer son art. Il n’avait pas l’intention de perdre une minute de plus avant de se mettre à l’oeuvre. Comme toujours, il ne s’attendait pas à ce qu’on vienne le déranger pour voir son travail, il ne s’attendait pas à ce que quelqu’un ne vienne en tant qu’acheteur. Il s’en fichait bien d’ailleurs, une telle interruption était plus dérangeante qu’autre chose. Le silence lui allait beaucoup mieux pour qu’il puisse oeuvrer, la paix était une nécessité pour une vocation aussi pointilleuse, n’oublions pas à quel point la perfection était demandante. Il ne pouvait pas relaxer sa concentration pour une raison aussi peu importante qu’un intrus dans son atelier. Six était un artiste, un créateur, il ne faisait certainement pas son oeuvre pour une pauvre rémunération qui ne valait certainement pas l’expertise dont il devait faire preuve. L’orfèvrerie n’était pas une vocation pour tous et ses fruits n’étaient pas davantage à la portée de chaque citoyen lambda. Il fallait mériter sa parcelle de perfection.
La pièce qu’il avait dans la main étant particulièrement difficile à tailler, Six décida alors de profiter de la lumière du jour. Normalement il répugnait à le faire, principalement parce que ça le rapprochait de la rue là où il pouvait éviter par la minuscule ouverture qui illuminait son atelier. Elle était suffisante son oeuvre, mais l’orfèvre devait parfois se rendre vers l’avant de l’atelier où les rayons de soleil s’infiltraient plus facilement. Il repoussa donc les rideaux qui obstruaient la lumière non sans un soupir bien significatif à la vue des passants. C’était exactement ce qui le dérangeait, mais il ne pouvait pas cesser son travail pour cette simple raison. La pièce qu’il taillait était prometteuse et il se devait de la terminer.  

C’était son intention tout de moins, mais elle fut interrompue lorsque Six remarqua un homme à l’extérieur de son atelier. Normalement il n’en aurait eu cure, pourtant, cette fois, il fut forcé à poser le morceau sur lequel il travaillait pour y prêter davantage attention. Pourquoi ? Simplement du fait que quelque chose chez cet inconnu attirait son attention, ou probablement quelque chose de moins plaisant. Peut-être était-ce un collecteur ? Non, il n’en avait pas l’air et pourtant c’était généralement ce genre d’individu qui arpentait les environs. Ça importait peu, à vrai dire, la raison pour laquelle le vagabonds avait remarqué l’autre individu, c’était uniquement parce qu’il lui avait obstrué la lumière ce qu’il se décida à lui faire savoir. Il se leva et alla mettre le nez hors de son atelier pour apostropher l’individu : « Vous m’empêchez de travailler. » Comprendre « vous bloquez ma lumière alors bougez ». Ça avait été légèrement écourté, rien de bien étonnant venant de Six, mais bon au moins il l’avait vouvoyez, c’était déjà ça !  

S’il avait su qu’en avertissant le type il devrait le tolérer, Six l’aurait probablement ignorer au mieux de ses capacités. Regrettant immédiatement son interaction qui lui valait maintenant une nuisance des plus grandes. Observant l’inconnu en question, il soupira légèrement et retint une plus grande exclamation de son énervement lorsque ce dernier décida de prendre la parole. Oh à la limite, il aurait pu s’accommoder de cette interruption dans son travail si elle s’était limitée à des excuses pour le dérangement de base, mais non. Ça aurait été trop beau autrement. Les sourcils froncés, il fut tenter de refuser, mais n’eut même pas le temps de le faire, ou d’autoriser l’individu à entrer, avant que ce dernier ne le pousse pour se permettre de son propre chef. Puis ce fut un flot de parole qu’il dut écouter sans trop broncher. Tout ça ne le mettait pas de bonne humeur, notamment parce qu’il n’avait pas l’occasion de placer un mot. Lorsque le silence revient prendre sa place de choix, Six fut tenter de le conserver et d’ignorer l’autre type. « Je suis orfèvre et ce sont mes oeuvres. » Oui, il avait volontairement ignorer une partie des questions qui lui avaient été adressées et sa réponse . Il n’aimait pas trop parler et devoir répondre à tout ce que l’inconnu avait dit nécessitait un effort qu’il n’avait pas envie de produire. Il n’était pas étranger aux efforts, pour atteindre la perfection il n’avait aucun problème à le faire, mais pour satisfaire les demandes d’un inconnu, il était nettement moins enclin. Retenant un énième soupir, il continua finalement à répondre à ce qu’on lui avait demander : « Certaines pièces sont à vendre, mais je crains de ne pas pouvoir vous sculpter. » Ce n’était pas qu’il était incapable de le faire, mais plutôt que ce n’était pas ainsi que ses oeuvres étaient créées. En effet, l’inspiration était maitresse de ses gestes et reproduire une personne n’était pas exactement une inspiration, sauf exception de personnes dont les traits étaient réguliers, voir symétriques. Disons simplement que ces personnes étaient de véritables exceptions dans le travail de Six. La perfection était capricieuse après tout et elle ne pouvait être motivée si facilement par une simple promesse d’argent. De l’argent, il en avait déjà une quantité impressionnante. « Pour le coût, tout dépend de la pièce. » Clair et net, il n’avait pas spécialement envie de s’attendre davantage. L’individu n’aurait qu’à lui montrer les pièces qui l’intéressaient il ferait le nécessaire pour lui dire le coût. Dans tous les cas c’était plutôt dispendieux, mais selon ses dires l’argent n’était pas un problème.