Tic tac, le temps passe, inlassable, inexorable, instoppable. Dure réalité qui fait se serrer le petit coeur de Cronos. C’est douloureux, cette sensation, cette peur, cette attente du gong final, du dernier coup de cloche, signal de l’agonie, du néant. Désespoir. Ca la réveille en sursaut, Cronos, cette peur qu’un jour son rythme cardiaque ralentisse, pour finalement se taire, que la douce promesse d’immortalité ne soit en réalité qu’un mensonge. Une ruse. Bien cruelle. Tous des sadiques. Parce que c’est amusant de jouer avec Cronos, la gamine sans mémoire, la femme sans passé, celle qui n’a que l’avenir devant elle et rien sur quoi se reposer. Mais vous allez me dire que c’est un peu le cas de tout le monde non ? Non. Non. Parce que Cronos n’a jamais su. Flash noir ou blanc quand elle ferme les yeux, quand elle essaye de se souvenir, de penser. rien.
Alors elle cherche quelque chose, Cronos, une attache dans ce nouveau monde, dans cette nouvelle existence. Elle cherche une main tendue, quelqu’un qui lui donner une raison de rester, d’exister, de délaisser ce putain de sablier qu’elle garde collé contre sa poitrine. Alors Cronos prend la vie comme elle vient, elle se laisse couler, ondulante, le long du chemin, comme un fleuve, Aesis, profitant des petits riens pour en faire de grands évènements, une pierre à ajouter au chemin de sa longue errance.
Elle est fuyante Cronos, inatteignable, un peu comme l’eau, elle vous coule entre les doigts. C’est elle qui vous attrapera et jamais le contraire. On la dit girouette, changeante, différente. Elle dirait plutôt perdue, paumée, indécise. Difficile de décider quel rôle enfiler quand on a aucune idée de qui on est, de nos gouts, nos couleurs ou encore nos envies. J’aime la peinture. Pourquoi j’aime la peinture ? Le rouge ? Le bleu ? Le blanc ? Je ne sais pas ce que je préfère, ni ce que je déteste…. C’est pas vraiment sa faute, à Cronos, si elle s’éloigne dès qu’on franchit la limite, dès que sa zone de confort est attaquée.
Elle enfile un costume pour se protéger, celui de la femme trop sérieuse au regard lointain, celui de la fille aux joues roses et au sourire attrayant, celui de Cronos, une Sauvée bouffée par l’angoisse d’un temps fini, d’une éternité tout sauf éternelle.