Plus jeune, j'avais découvert une serre abandonnée, qui devint rapidement mon refuge, ma deuxième maison. Les plantes grimpantes recouvraient la serre, comme une couverture verte et je pouvais m'y abriter quand j'en ressentais le besoin. Dès lors, je me suis mis à m'intéresser à la botanique et je me cachais à la bibliothèque pour lire sur le sujet. J'appris comment m'occuper des fleurs et peu à peu, la vie revint à l'intérieur.

Et je racontais mon histoire à mes fleurs, dans leur beauté silencieuse et leur parfum réconfortant.

« Maman, vous savez, elle était vraiment belle. Je me souviens souvent de ses longs cheveux blonds et soyeux (je touche les miens), mais maintenant, ses cheveux ne sont plus comme avant. Maman les a coupé. Maman a pris les ciseaux et les a coupé. Maman a l'air triste. Je sais pourquoi elle est triste. Je sais pourquoi je suis triste.

Je ne parle jamais de Papa. Il est méchant avec elle. Avec moi. Il veut que je sois un garçon, mais je ne suis pas un garçon. Maman veut que je sois une fille, mais je ne suis pas une fille. Je ne sais pas qui je suis.

Papa dit que je ressemble trop à Maman. Papa n'aime pas Maman. Il me fait mal. Il lui fait mal. Il boit beaucoup, il ne sent pas bon. Il me fait peur, c'est pourquoi je suis ici. Vous, vous êtes belles, vous êtes gentilles. Une fois, Maman a voulu partir avec moi, je me souviens de sa main qui tenait la mienne, et je tenais ma petite valise. Je suivais Maman. Mais Papa est apparu à l'arrêt de bus et il a pris Maman. J'ai suivi Maman.

Je ne veux pas retourner chez moi ce soir. Mais je dois être fort pour Maman. »

Tous les soirs, Papa boit. Papa n'est jamais lui même.
Il est différent, depuis qu'il a perdu son emploi, depuis qu'il s'est mis à boire.
Je déteste Papa.

Maman était belle avant.

Le temps a emporté Maman.

Les années sont passées.

Elles sont passées, mais rien n'a changé depuis le départ de Maman.

Je suis retourné à la serre aujourd'hui, il faisait noir. J'ai encore les jambes tremblantes. Je sais que je pleure mais je ne sens rien. J'ai mal.

Je veux rejoindre Maman.
J'ai volé le fusil à Papa.

J'ai appuyé.
Et j'ai oublié.






Je m'appelle Blondie et je suis ici depuis plusieurs décennies. Le temps ne compte plus.