APPELLATION - Pénombre. Un nom fade, terne. Un nom qui n'augure rien de bon et qui illustre à la perfection le néant sombre dévorant les entrailles de la damnée.

ANCIENNE IDENTITE - Amaterasu Yukimura. Douce ironie, passer de la déesse du Soleil à Pénombre.

SURNOM - On l'appelle Odette, pour diverses raisons qui lui échappent. Peut-être ce surnom vient-il d'Odette de Brabant, peut-être pas. Elle-même n'en sait rien et semble s'en moquer éperdument.

AGE PHYSIQUE - Pénombre s'est éteinte à dix-huit ans, d'un violent coup de sa mère saoule.

NATIONALITE - Née au Japon, elle y a vécu toute sa courte vie aux côtés d'une mère nippone et d'un père coréen.

METIER - A voir, si quelqu'un a une proposition je suis ouverte.

LIEU DE RESIDENCE - On l'a assignée au calme de Rhode, lui offrant une douce maisonnée en toute intimité.

GROUPE - Des pêchés dont elle n'a aucun souvenir l'ont conduit chez les Damnés.

TRIBUT - L'équilibre {underco}.

Petite fille née dans une famille purement asiatique, elle a bien vite dû se rendre compte que l'affection n'était pas de mise chez les Yukimura. Un paternel effacé, une mère d'une rare violence dès son jeune âge et, surtout, la répétition d'une phrase, parfois tournée différemment : « Je n'ai jamais voulu de toi, pauvre conne. » Une génitrice qui la frappait sans pitié, un père qui attendait d'elle qu'elle brille scolairement malgré les cicatrices parcourant son corps.

Une routine s'est vite installée. Les jours de semaine, Amaterasu travaillait, allait à l'école et obtenait des notes prestigieuses. Les soirs de semaine, Amaterasu voyait sa mère rentrer et la laissait trouver une excuse pour abattre sa bouteille à moitié vide sur différents membres – le nombre de coups variait avec le taux d'alcool dans le sang de la marâtre.
C'est en lisant quelques articles sur les enfants battus que la demoiselle a remarqué que sa famille semblait décalée avec le reste du monde. Dans les maisons « classiques » - si on peut appeler ainsi un environnement violent et infecté par la haine –, le père était l'agresseur et la mère l'effacée, la soumise au royal homme qu'elle avait épousé pour Dieu sait quelle raison.

Ici, l'inverse était tout simplement stupéfiant. Madame Yukimura passait ses soirées dans des bars jusqu'à une heure tardive puis se souvenait de sa tendre famille. Madame Yukimura battait sa progéniture comme on frappe un chien errant qui nous aurait volé de la nourriture.
Puis Madame Yukimura, une fois l'alcool éliminé de son sang, s'excusait. Elle grattait à la porte d'une Amaterasu tremblante de douleur, les épaules secouées de sanglots et souvent le visage recouvert de sang et de bave. Elle murmurait des promesses qu'elle ne tiendrait pas, suppliait sa fille de lui ouvrir pour qu'elle panse les blessures qu'elle avait elle-même causées.
Une fois, la porte a été ouverte.
Une fois, la mère avait serré son gosse dans ses bras.
Une fois, la mère avait ensuite tenté de l'étrangler, d'ôter la vie d'une demoiselle déjà maintes fois meurtrie.

Alors enfin, Papa a agi. Papa a repoussé sa femme, Papa a offert à Amaterasu un réel regard triste, empli d'une compassion qui a dégoûter la gamine. Quatorze ans, le chemin se brise dans un tournant, l'accident se rapproche et l'attention s'effrite.
Amaterasu apprend à danser.
Les pas lui vident l'esprit, la musique dénoue ses muscles. Sentir ses pieds s'envoler lui donne des frissons, quitter le sol l'émerveille. D'abord, la danse est un passe-temps. Elle ne la pratique que deux voire trois fois par semaine, s'y rend seule et n'y passe que très peu de temps. Puis les études deviennent lassantes, à seize ans on n'aspire à la liberté, la crise d'adolescence choisit d'atteindre son paroxysme ou de s'éteindre lentement.
Alors on se rebelle, on brave les interdits.

Amaterasu devient peu à peu Pénombre, les plaies se font plus rares mais surtout plus importantes. Madame Yukimura devient plus violente avec le temps, elle abat parfois des bouteilles brisées pour mieux écorcher.
Et la fois de trop arrive aux dix-huit ans d'Amaterasu. Un soir où elle a pris son courage à deux mains, où elle a annoncé son désir de poursuivre vraiment son rêve et de devenir une danseuse professionnelle. Maman n'a pas aimé cette nouvelle, Maman a frappé à en briser le crâne d'Amaterasu, à en faire gicler sa cervelle sur le sol. Maman a brisé ses propres os sur la carcasse désormais sans vie de sa pauvre fille.
Maman a tué Amaterasu pour donner vie à Pénombre.

Pénombre qui perd l'équilibre, Pénombre qui vient d'arriver. Pénombre qui s'est écrasée à Libra sans souvenir, si ce n'est l'impression désagréable d'avoir perdu plus que sa propre vie.
Pénombre, qui porte malheureusement bien son nom.