- Tu n'aurais pas dû jouer au con avec nous. Tu aurais dû te douter que ça se terminerait ainsi.
Non... Non, putain non. Pas comme ça. Pas maintenant. Pas avec un flingue posé contre ta tempe. La sueur dégouline le long de ton front, ça te glace l'échine. Pourquoi putain ? Ta vie allait vraiment finir comme ça ; en une fraction de seconde, par une putain de balle, dans un hangar aussi crade ? Akira, tu vas la voir venir... Tu vas voir venir ta mort. Une mort pathétique, une mort des plus pourri de l'histoire. T'as voulu être bon, t'as voulu aider et voilà ce qu'il va t'arriver. Ce n'est pas lui, mais toi qui vas être fusillé. Ce mec sourit, presse la détente lentement, un bruit retentit, ton corps tombe... Pas de messe dite, pas d'Amen ». Retour en arrière peut-être ? Pour expliquer aux gens comment tu t'es retrouvé dans ce hangar ? Pas une mauvaise idée...

La naissance d'un enfant est un événement heureux, nous serons tous d'accord là-dessus. Pourtant, il y a des familles qui ne désirent aucunement avoir un enfant, pour qui le mot « naissance » ne fait ressentir que peine et amertume. C'était le cas de son père et de sa mère, l'un étant l'un des plus gros enfoirés que cette terre n'est jamais portée, engrossant les femmes à une vitesse incroyable et disparaissant aussitôt... L'autre voyait la vie comme un conte de fées, un peu trop peut-être ; aimer les mauvais garçons ce n'est jamais une bonne idée, surtout quand on est une fille de bonne famille... Vous l'aurez compris, la naissance d'Akira qui n'était pas un enfant désiré, qui était un enfant sans père, ce fut de mauvais augure, le reste de la famille voyait cela d'un mauvais œil... Peu résolue à l'abandonner, sa mère se mit à l'éduquer seule, sans l'aide de personne ; et sans l'aide du reste de sa famille, qui l'avait renié comme une moins-que-rien. Elle se débrouilla, avec toute la force dont elle était capable ; et même si cette enfant venait d'un homme qu'elle détestait dorénavant, elle donna tout l'amour possible à son enfant... Amour dont Akira comprenait de moins en moins la signification plus il grandissait. A force de chercher à vouloir connaître son père, on entend forcément parler de l'envers du décor, on entend des choses que l'on aurait préféré ne pas savoir ; des trucs qui peuvent vous rendre barge.


L'histoire d'Akira commence là, le début de la catastrophe.

Quand on sait qu'on est le fils d'une pourriture, qu'on a sans doute six frères et huit sœurs un peu partout dans Tokyo, on ne peut pas vraiment rester serein. On se demande le pourquoi du comment ; on se demande comment quelqu'un peu agir ainsi sans aucune honte, aucune vergogne. C'était le cas d'Akira. Peut-être n'aurait-il pas du tiré les vers du nez à sa mère, peut-être, aurait-il dû faire celui qui ne voulait pas savoir ; mais ne pas avoir de père, pour un jeune homme, c'est difficile, c'est insupportable. À qui parler sport ? À qui parler des problèmes de la vie ? Il pouvait le faire avec sa mère, mais à ses yeux, ce n'était pas pareil ; il le voyait très bien quand il parlait avec le père de son meilleur ami, il voyait bien que ce n'était pas pareil. Pas les mêmes centres d'intérêt. Une cassure, un lien qu'il n'aurait jamais avec personne et certainement pas avec sa mère... Pauvre femme. Il chercha, encore et encore, sans aucun répit la trace de son père ; aussi salopard qu'il pouvait être, il voulait voir ça de ses yeux... Si seulement, si seulement il n'avait pas cherché... Retrouver la trace de quelqu'un n'est pas chose difficile dans ce monde, il faut juste être motivé à chercher... Un homme, en train de faire la manche, dans un piteux état, des pansements sur la tronche, une jambe flottante, il avait certainement dû faire des conneries et fréquenter les mauvaises personnes à telle point qu'on lui avait brisé les genoux ? On récolte ce que l'on sème, c'est ce que sa mère lui avait appris, c'est ce que la vie jour après jour lui rabâchait... Jamais... Jamais Akira ne finirait comme ça... Si seulement.

Les notes dégringolent ; le moral ne suit plus. Seul le sport le fait tenir ; mais pendant les compétitions, dur de rester au top de sa forme... Des gens cherchent à rester au top dans n'importe quelles circonstances. C'est là le début de la fin pour toi Akira. Parce que t'as commencé à vendre des trucs pas très nets, à traîner avec des gens peu recommandable ; nouvelle cassure dans la famille, nouvelle fissure entre ta mère et toi. Vous ne parlez plus, tu vis dans un autre monde. L'argent apparaît, disparaît aussitôt... Tu vagabondes dans les rues de la ville de nuit, Shinjuku, lieu de débauche éternel, lieu pitoyable et peu fréquentable... Tu commences à perdre pied, tu sens le début de la fin, tu sens la folie te happer peu à peu. Tu vends de la merde à des gens pourris, des trucs de meilleures qualités à des gens bien. Tu te crois objectif alors que tu deviens toi-même l'un des pires déchets de cette ville ; encore pire que ton père...

Non. Jamais pire que ton père. Akira, si Izaki n'avait pas été là, où serais-tu ? Au fond du trou. Une amitié pure, une amitié qui l'aura sorti de cet enfer ; un enfer dans lequel il avait plongé lentement, mais sûrement... Si seulement. Si seulement les choses pouvaient être aussi simples. Si seulement arrêter le trafic de stupéfiants pouvait être aussi facile. Akira et Izaki avaient un plan, mais ils n'avaient pas imaginé jouer vraiment dans la cours des grands. Ça commence par dealer des stéroïdes, puis des cachets pour des gens au lycée, puis à des choses beaucoup plus grosses et encore plus illégales dans les rues de Tokyo... Pour qui ? Ils n'avaient jamais cherché à comprendre... Ils auraient dû. Car les yakuzas ne rigolent jamais avec l'argent disparu et la came qui se volatilisent. C'est comme ça qu'Akira à fini dans ce hangar ; seul. Izaki ? C'est Izaki qui t'a vendu, pour sauver sa peau... Tu te rappelles Akira ? Il t'avait dit qu'il devait livrer une dernière chose et qu'après, ce serait fini... Tu t'étais porté volontaire, t'avais voulu être bon, sympa, jouer la carte de l'honnêteté ; ce que ton père n'avait jamais fait... Et voilà. Voilà comment ça se résume. A force de vouloir être bon, on finit par être baisé.

C'est Akira qu'on passe à tabac. C'est Akira qui mange les coups de pied, les coups de poing, qui se prend les insultes, qui fini la gueule en vrac, l'intérieur de la bouche en sang. C'est lui qu'on pointe d'un revolver ; c'est lui qui ne rentrera pas à la maison pour manger un bon repas chaud... La scène se répète inlassablement dans sa tête, il va se faire shooter, comme ça, dans un hangar aussi crade, aussi pourrit... « On ne joue pas avec les yakuza, nous, on ne nous baise pas. » Le bruit retentit, la gâchette est pressée, il n'a même pas le temps de ressentir la douleur... Les pupilles perdent de leurs lueurs... La morale de ton histoire Akira – tel est baisé qui croyait baiser.